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10/01/2022

Trois questions à Isabelle Verrecchia

de la Fondation M6

Partenaire d’Auxilia, la Fondation du Groupe M6 a pour objectif principal de lutter contre la récidive en favorisant la réinsertion des personnes placées sous main de justice. A travers une mission de plaidoyer, elle souhaite également mobiliser le monde économique sur l’emploi des personnes ayant connu un épisode carcéral. Interlocutrice privilégiée d’Auxilia, Isabelle Verrecchia, Directrice de l’Engagement du Groupe M6 et Déléguée Générale de la Fondation a accepté de répondre à nos questions.

 

INTERVIEW

 

Quel est le rôle de la Fondation du Groupe M6 ? En particulier, pouvez-vous nous parler de l’engagement des collaborateurs du Groupe en faveur de l’embauche de personnes sortant de détention ?

Depuis sa création, en 2010, la Fondation du Groupe M6 soutient et met en œuvre des projets à destination de l’univers carcéral avec pour objectif principal de lutter contre la récidive en favorisant la réinsertion des personnes placées sous main de justice.

Au fil des années, notre champ d’intervention a évolué. Pour le 3ème mandat en cours, nous avons deux axes prioritaires. Le premier est la question du retour à l’emploi, au sens large. Nous entendons par là, les sujets de formation professionnelle, d’acquisition de compétences, y compris des compétences psycho-sociales, de création d’entreprise ainsi que la maîtrise des savoirs de base, essentielle pour se réinsérer. Notre deuxième axe, plus récent, consiste à soutenir des projets d’alternatives à l’incarcération. Ces 11 années de terrain au plus près des associations et des bénéficiaires, nous ont convaincus que la prison n’est pas toujours la réponse la plus adaptée.

Depuis 11 ans, au-delà des actions de la Fondation, le Groupe M6 est également acteur du changement en intégrant des personnes placées sous-main de justice au sein des effectifs RH. Le Groupe M6 souhaite être exemplaire sur ce sujet. Parmi les personnes qui croisent le chemin de la Fondation ou de ses associations partenaires, nous identifions des profils qui pourraient correspondre aux besoins de l’entreprise.

Par ailleurs, les collaborateurs participent à des actions de la Fondation en détention. C’est important de passer de l’autre côté des barreaux pour faire changer les regards sur la prison et les personnes détenues. Certains peuvent avoir des craintes, des interrogations ; elles sont légitimes. Nous essayons d’y répondre et d’en parler pour déconstruire certaines représentations. Venir en prison, pour ceux qui osent franchir le pas, c’est faire bouger les lignes.

 

Nos collaborateurs se mobilisent également lors d’actions se déroulant au sein de l’entreprise : par exemple dans le cadre d’un module de découverte de l’entreprise lancé en 2021, que nous avons construit de toute pièce. Nous ouvrons, le temps d’une journée, les portes du Groupe aux personnes sous-main de justice afin qu’ils vivent une expérience positive du monde de l’entreprise. Cette journée permet de comprendre le fonctionnement d’une entreprise et ce qui est attendu d’un salarié. Elles bénéficient de conseils RH pour présenter leurs parcours et projets professionnels lors de futurs entretiens.

En somme, ce module permet de déconstruire les représentations réciproques entre univers carcéral et monde de l’entreprise.   

Pour chaque projet, au-delà de la Fondation, nous attachons une importance à mobiliser les compétences du Groupe M6 qui pourraient apporter une plus-value aux actions mises en place.

Qu’est-ce qui vous a motivé à soutenir l’association Auxilia depuis 2019 ? En particulier, vous nous avez soutenu sur la digitalisation de modules de formation. Pourquoi, selon vous, l’accès à l’enseignement numérique est-il une nécessité pour toutes les personnes détenues ?   

Pour retrouver un emploi, quel que soit le métier visé, il y a évidemment un socle de compétences indispensables. L’acquisition des savoirs de base, est une question essentielle à laquelle répond l’Education nationale, présente en détention. Auxilia propose une alternative à ce schéma-là, à travers des accompagnements en présentiel mais aussi des modules de formation d’e-learning.

Auxilia a réalisé des vidéos, quizz et fiches pratiques sur les questions que peuvent se poser des personnes éloignées de l’emploi en sortant de détention. Très concrets, ces modules apportent un soutien pratique.  

Le point commun de ces modules ? L’enseignement numérique à distance que l’on appelle, e-learning. Auxilia a envisagé des modes d’échange et d’apprentissage différents bien avant la crise sanitaire ! Utiliser des supports multiples permet d’offrir des formations qui correspondent aux différents profils des apprenants.

On parle d’illettrisme, mais aujourd’hui, il faut également aborder l’illectronisme. Initier au numérique, c’est préparer à la vie qui attend les personnes détenues à l’extérieur, où le numérique prend de plus en plus de place. Il est important de se confronter entre les murs aux nouvelles pratiques. Le contexte sanitaire a favorisé le recours au digital mais d’importants progrès restent encore à faire en détention sur ce sujet de l’accès au numérique comme levier d’insertion (démarche administrative, maintien des liens familiaux…)

Quel message de soutien adresseriez-vous aux apprenants détenus et aux bénévoles qui les accompagnent ? 

Quels que soient les sujets, mais encore plus sur celui des apprentissages, je crois beaucoup aux rencontres.

Enfant, nous avons tous eu un enseignant qui nous a fortement inspiré, qui a cru en nous et nous a permis de dépasser nos limites. Il en est de même pour les personnes détenues et les bénévoles d’Auxilia.

Ce lien apprenant-formateur est essentiel. Les bénévoles d’Auxilia répondent au besoin d’avoir quelqu’un près de soi qui tout au long des apprentissages guide et fait progresser.  Rares sont ceux qui se sont construits sans l’aide d’autrui.

Le e-learning est nécessaire mais il ne pourra jamais remplacer ni les interactions humaines ni la confiance et la reconnaissance mutuelle dans les yeux de chacun.

 

Propos recueillis par Stéphane, Auxilia une nouvelle chance.

 

Pour enrichir cette rencontre, n’hésitez pas à découvrir également les écrits des participants au concours d’écriture « Au-delà des lignes » organisé chaque année par la Fondation du GroupeM6 dans de nombreux établissements pénitentiaires…

 

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