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15/01/2016

CRP : Le projet professionnel en RAN Déclic

L’accompagnement au projet professionnel en RAN Déclic

L’accompagnement au projet professionnel par les psychologues démontre l’importance fondamentale de l’apport psychologique (et par la-même formatif) axé essentiellement sur une individualisation quasi-totale, mettant en œuvre tout un processus d’interventions et de méthodologies complémentaires et adaptées à la reconversion professionnelle.

 

Au CRP AUXILIA, ce sont les psychologues Annabelle PATTIER et Lynda WELTER qui œuvrent dans toutes les étapes de la formation. Cependant, c’est surtout en RAN DECLIC (Remises À Niveau) que leur travail, étroitement associé à celui des Formateurs, se présente comme un enjeu professionnel pour chaque stagiaire, voire un changement de vie, dans l’acceptation du deuil de l’ancien métier.

Elles nous expliquent ci-après l’importance majeure et le bien-fondé de ce travail.

Par Annabelle PATTIER,
Psychologue du travail – Chargée d’insertion:

Le CRP AUXILIA reçoit deux groupes de 13 personnes durant six mois sur l’action RAN DECLIC, existante depuis les origines du Centre.

Chaque groupe est accompagné par une psychologue sur la partie projet professionnel, à raison de six heures d’animation collective par semaine. Les entretiens individuels permettent d’affiner les projets, mais également de travailler sur les axes de progrès de chacun, d’individualiser les parcours et d’aborder les difficultés personnelles potentielles que le groupe ne permet pas d’investiguer.

Remise à niveau dans les matières de base, élaboration et mise en œuvre du projet validé par un stage découverte, ateliers transverses (ARL, théâtre, arts plastiques, ateliers d’écritures…), sont les fondements de ce parcours. L’enjeu de ce parcours n’est pas la passation d’un examen, ni à fortiori l’emploi direct, mais une étape cruciale pour le devenir professionnel du stagiaire qui se trouve dans une perspective de changement, de virages, mais également de doutes et d’incertitudes face à un métier qui lui tenait généralement à cœur, mais qu’il ne pourra désormais plus exercer en raison d’inaptitude à son poste de travail.

Histoires de vies différentes, parcours professionnels jalonnés de réussites, d’échecs, voire de souffrances pour certains, toutes les personnes que nous accompagnons sur le dispositif DÉCLIC ont en commun la nécessité de renforcer, réactualiser et (ou) apprendre à réapprendre les apprentissages du français et des mathématiques.

Pour beaucoup, ce cursus scolaire général de base a fait défaut pour diverses raisons (maladies, problèmes familiaux…), ou n’a pas bien été assimilé, ce parfois à partir de la sixième des collèges. L’accompagnement au projet professionnel est donc sous-tendu par la progression du stagiaire dans les matières de base sans laquelle aucune entrée en formation qualifiante n’est possible. Autre levier de réussite dans le projet, la remobilisation et la reprise de confiance en soi, souvent disparue, minorée, altérée par des évènements personnels et/ou professionnels encore douloureux à évoquer pour la personne.

L’objectif est donc de faire émerger un projet, c’est-à-dire un métier compatible avec les intérêts, aptitudes, tempérament et potentiel d’apprentissage de la personne. Cette période de six mois est donc importante et peut être perçue comme un tremplin qui permettra au stagiaire d’accéder à un nouveau métier par la formation.

Notre cadre d’intervention en projet se réfère à la méthode du trèfle chanceux de Jacques LIMOGES (1997). C’est un modèle opératoire d’insertion professionnelle qui stipule que la réussite d’une insertion professionnelle réside dans la maîtrise qu’a l’individu de quatre dimensions en interaction : l’environnement socio politico économique dans lequel il évolue, la connaissance qu’il a de lui-même (le SOI), sa connaissance des méthodes (au sens techniques de recherches d’emploi), sa connaissance des lieux comme secteurs qui peuvent lui apporter des informations sur son projet (ex : pôle emploi, MEFE…). Plus l’individu connaîtra au mieux ces dimensions, plus ses chances d’insertion professionnelle seront optimisées. L’accompagnement au projet va donc être un va-et-vient autour de ces dimensions que les stagiaires vont découvrir, puis s’approprier au mieux à travers des exercices écrits, des temps de restitutions oraux construits autour de ces dimensions. En début de parcours, chaque stagiaire reçoit un « livret repère projet » qu’il peut consulter à tout moment. Celui-ci reprend les quatre dimensions du trèfle chanceux comme cadre d’intervention, avec pour chacune, les thématiques qui seront abordées tout au long de ces six mois. Il peut alors repérer plus facilement l’avancée de son projet et les axes de travail encore à accomplir.

LES ÉTAPES DE MISES EN ŒUVRE DU PROJET

1.FAIRE LE BILAN PROFESSIONNEL ET PERSONNEL DE SON PARCOURS

 

Bilan professionnel :
- Point sur les attentes, aspirations, système de contraintes du stagiaire, afin de repérer les freins potentiels au projet
- Point sur le parcours professionnel : identifier puis valoriser (c’est-à-dire argumenter), autour de ses compétences définies par les trois notions clés que sont les savoir-faire, les savoirs et les savoirs être.
- Construire un cheminement de pensée : dans quel contexte j’ai su mieux le faire, différences entre le « je sais faire » et le « j’aime faire », ce que je peux mieux faire ou apprendre à l’avenir en partant de mes acquis…
- Identifier les compétences transférables à d’autres secteurs, métiers…

 

Bilan personnel, ce que je suis :

- Identifier et valoriser par des exemples étayés et illustrés : qualités, faiblesses, valeurs, centres d’intérêt professionnels et extra professionnels,
- Identifier globalement les caractéristiques de son profil : points forts et limites pour le ou les projets envisagés.

 

2. DETERMINER PUIS EXPLORER DES PISTES DE RÉORIENTATION POSSIBLES

Exploration des métiers identifiés à partir des champs d’intérêts professionnels dégagés : travail sur fiches métiers papier (fiches ROME, CIDJ…) et analyse des données recueillies.
Analyse comparative des offres du marché qui concernent le projet professionnel envisagé : qui recrute, à quel volume, sur quels profils… ?
Réalisation d’enquêtes métiers : il s’agit de rencontrer des professionnels du secteur choisi afin de confronter sa représentation du métier sur le terrain. Chaque enquête fait l’objet d’un questionnaire construit par les stagiaires. Chacune fait également l’objet d’un retour oral en groupe afin que le stagiaire s’approprie les informations qu’il a collectées et soit capable d’en rendre compte de manière structurée et dynamique. Les stagiaires effectuent leurs enquêtes en autonomie, mais ont aussi la possibilité de les réaliser en petits groupes sur des entreprises partenaires et recevant les stagiaires à cet effet. Ces premiers contacts pris par les stagiaires concernant leurs nouveaux projets à travers des enquêtes métiers sont souvent aidants pour aboutir à un accueil en stage.

  • Le stage « découverte » de quinze jours en entreprise qui comprend les étapes suivantes :
  • Réalisation des outils de recherche que sont le CV et la lettre de motivation (au singulier comme au pluriel en cas d’exploration de plusieurs projets en même temps).
  • Ciblage des entreprises à prospecter pour le stage
  • Simulation d’entretien d’embauche
  • Simulation de réceptions d’appels en cas de prise du téléphone lors du stage
  • Tenue d’un carnet de bord journalier durant les quinze jours en entreprise, puis réalisation d’une fiche synthèse de présentation comme support pour le retour oral de stage en présence des deux groupes DÉCLIC et de l’équipe pédagogique. Le stage en DÉCLIC fait l’objet d’un suivi téléphonique auprès des tuteurs qui en fin de période, renseignent une grille d’appréciation finale sur le stagiaire.


3. MESURE DES ÉCARTS ENTRE ACQUIS ET PROJET VISÉ / VALIDATION ET MISE EN ŒUVRE D’UN PLAN D’ACTION

 

Mesure des écarts par la passation d’une batterie de tests de raisonnement
Il s’agit ici de procéder à l’aide d’une batterie de tests d’aptitudes cognitives, à une mesure des écarts entre ce qu’a acquis le stagiaire au terme des six mois de formation (sa progression dans les matières de base) et les prérequis exigés par le niveau de formation que le stagiaire envisage d’effectuer.
Afin de dédramatiser la situation de tests, très souvent source d’angoisses pour le stagiaire, des séances d’entraînement aux tests de logiques sont organisées, ce qui permet d’appréhender en douceur, les divers types de raisonnements pouvant être évalués (verbal, numérique, spatial…), ainsi que les mécanismes qui se mettent en place pour résoudre les situations de problèmes proposées dans les exercices.

Validation du projet et mise en œuvre du plan d’action
Le stagiaire arrive ici en fin de parcours et touche de près à son projet par l’entrée en formation qualifiante, ou par la préconisation d’actions temporaires lui permettant au plus vite d’intégrer une formation ou un emploi. On y trouve les étapes suivantes :
Recherche de la formation attenante au projet : modes de financement, modalités de recrutement…
Prise de contact avec les organismes de formation visés : visites de centres…
Réactualisation du CV si nécessaire
Mise en place d’un plan d’action à court ou moyen terme
Rédaction en concertation avec l’équipe pédagogique et avec le stagiaire, de la synthèse des actions à transmettre aux partenaires pour rendre effective l’entrée en formation.
L’équipe met un point d’honneur à travailler en étroite synergie et effectue des points réguliers : bilan à un mois, bilans intermédiaires et bilans fin de parcours. Les psychologues et partenaires qui ont orienté le stagiaire sur le dispositif sont également associés au suivi du projet et sont consultés en cas de difficulté chez le stagiaire, ou dans la mise en œuvre du projet en lui-même.
Toute cette démarche est bien sûr conditionnée par la volonté du stagiaire avant tout et par son assiduité globale dans tous les cours. La réussite du projet n’existe pas sans la volonté du stagiaire et sans une certaine détermination. Elle nécessite donc une ouverture d’esprit permanente et le développement d’une maturité personnelle, professionnelle et relationnelle que l’équipe aide à faire émerger. Un certain nombre de stagiaires ne savent plus ce qu’est l’autonomie et ne sont plus en mesure de faire des choix, de se projeter…, en raison de parcours personnels difficiles, d’emplois antérieurs plutôt exécutants, laissant peu de marge d’épanouissement personnel et d’autonomie dans le travail. En raison également d’une santé si précaire qu’elle les a contraints à changer de voie en dépit souvent de leur volonté de quitter un métier qu’ils appréciaient, voire qui les passionnait.

Ce fameux « deuil » qu’il faut travailler, mais qui parfois en six mois n’est pas encore « digéré ».

Outre l’accompagnement au projet pur, la dimension remobilisation et redynamisation des stagiaires participe grandement à la réussite de leurs parcours, nous dirons même que sans remobilisation, dynamisme, reprise de confiance en soi… (autant de termes différents, mais allant tous dans le sens d’un meilleur épanouissement de la personne), il n’y a pas de projet. À travers cette remobilisation du stagiaire, c’est le projet en lui-même qui prend vie et qui se réalise. Elle peut prendre du temps et n’arrive pas forcément dans le temps de six mois.

La remobilisation sous-tend pour tous les participants à ce dispositif:

Le partage des informations en groupe pour ce qui entoure l’évolution du projet professionnel, notamment les succès, mais également les expériences moins réussies
La régularité et de l’efficacité des rencontres de l’équipe pédagogique 
Des décisions d’orientations concertées et partagées par l’équipe dans sa globalité, non par le psychologue seul qui ne peut faire aboutir un projet sans tenir compte d’une progression globale. L’orientation ne donne pas forcément lieu directement à une entrée en formation, mais sous-tend quelquefois des étapes intermédiaires : suivi psychologique, poursuite des actions de remise à niveau pour une meilleure consolidation, autres soins à entreprendre…
Amener le groupe à partager, échanger puis valoriser les compétences, connaissances et habiletés
Créer du lien en valorisant les contributions de chacun par des temps collectifs : restitution orale des productions écrites en projet, mise en place d’ateliers transverses (vernissage en arts plastiques, représentations théâtrales en fin de parcours, exposés personnels devant le groupe, partage d’univers culturels (recettes de cuisine, rites et coutumes d’un pays en particulier, sorties pédagogiques, portes ouvertes métiers…).
Éviter les obstacles à la communication, tels le jargon, les stéréotypes, les jugements de valeur, le sentiment de toute puissance du professionnel face au stagiaire.
Permettre de parler des différences de chacun dans un cadre commun : ex, cadre de la loi de 2005, informations autour de la classification des handicaps selon cette même loi…
Ouvrir le champ des possibles et éveiller la curiosité intellectuelle : ex, présentations de formations et métiers spécifiques hors du CRP AUXILIA, témoignages d’anciens stagiaires, lecture d’ouvrages pour exposés.
Amener le stagiaire à se poser des questions plutôt que de fournir toujours des réponses, les placer dans un contexte de production collective, dans laquelle chacun trouvera une place gratifiante dans un objectif commun, celui de poursuivre son parcours en formation ou en emploi.
Développer un réseau de partenaires de proximité pour faciliter la mise en œuvre du projet et son exploration.

 

Par Lynda WELTER
Psychologue clinicienne et du travail – Chargée d’insertion :

L’accompagnement DECLIC a pour but de concrétiser le projet professionnel du stagiaire. La démarche de cet accompagnement proposé est de soutenir le stagiaire dans la définition et l’élaboration de son projet professionnel, de l’aider à identifier ses attentes, ses points forts, ses objectifs, ses valeurs, mais aussi ses limites liées à ses problèmes de santé, cognitifs ou d’ordre psychologique. Et enfin, cet accompagnement suit de près la réalisation et la faisabilité du projet professionnel.


Nous utilisons différents outils et supports selon la demande et les situations individuelles. En effet, certains stagiaires viennent ici en n’ayant toujours pas fait le deuil de leur ancien travail, car c’est souvent le seul métier qu’ils n’aient jamais exercé.

Cet accompagnement a pour principal objet d’aider le stagiaire dans l’élaboration d’un projet professionnel et d’acquérir une qualification reconnue lui permettant l’accès à l’emploi. Le stage de découverte que nous proposons a pour objectif de mettre concrètement en immersion professionnelle le stagiaire afin d’infirmer ou de confirmer son orientation professionnelle ainsi que la faisabilité de ce projet.

 

L’accompagnement n’est pas limité dans le temps puisque chaque stagiaire qui vient chez nous est suivi pendant et après la formation afin de lui faciliter son insertion professionnelle.

Pour entrer plus en détail de notre rôle et surtout de notre dispositif de formation préprofessionnelle, nous pourrions dire que nous mettons à la disposition de nos stagiaires une documentation, des connaissances, des moyens et une individualisation pour faciliter l’accompagnement de leur insertion. Cet accompagnement se caractérise principalement par des échanges verbaux afin de mieux comprendre le rôle de chacun, mais aussi afin d’englober l’individu dans toute sa singularité.

 

Selon Donald Super, l’individu a droit à la formation tout au long de sa vie. Cette orientation doit reposer sur une autonomie de la personne, ainsi que sur une prise de responsabilité intrinsèque qui doit permettre à la personne de structurer sa réflexion. De plus, il s’agit pour nous de les aider à choisir tout en leur donnant les moyens de décider en connaissance de cause.

Une fois les informations en main, le sujet devient acteur de son projet, c’est-à-dire qu’il se  projette dans le temps et dans l’espace. En effet, ce n’est donc plus une idée, mais un cheminement désiré qui va conduire l’individu à l’action, à la réalisation de son projet, à l’exploration des possibles. Cette construction de projet professionnel peut être considérée comme une stratégie de résolution de problèmes et permet d’identifier les possibles, de les mettre en ordre, et d’évaluer les options les plus intéressantes.

La personne pourra ensuite décider en connaissance de cause et actualiser les différentes étapes de son projet.

 

En conclusion, le projet incite au développement des capacités pour atteindre un but, il enrichit les représentations du monde du travail, favorise l’insertion sociale et est un vrai dispositif de motivation. Ainsi nous pouvons dire en une phrase que le processus de l’accompagnement au projet professionnel vise la mise en œuvre de démarches stratégiques privilégiant les interactions et l’autonomie de la personne.

 

 Marie Thérèse THEIL,

ancienne formatrice CRP

 

 

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