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02/11/2017

Le numérique en détention

Alors que l’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle est un droit fondamental, il apparait comme un privilège aux yeux de beaucoup, les détenus eux-mêmes et les surveillants (le droit d’étudier, plutôt que de travailler ou de s’adonner à des activités manuelles ou sportives). Par ailleurs les dispositifs de communication comme le téléphone et le courrier sont limités à un usage privé et la vidéo-conférence à des fins judiciaires. Les contrôleurs généraux des prisons ont à plusieurs reprises, demandé à l’Administration de doter les cellules d’internet pour réduire la fracture numérique et apporter des réponses adaptées aux besoins de la population pénale. Le Conseil National du Numérique a également appelé à inscrire dans la loi, un droit d’accès au numérique pour les détenus, car comment accéder à la dématérialisation des démarches administratives quand on est en prison et que l’on veut se réinsérer? Plusieurs travaux universitaires se sont penchés sur la problématique d’une formation numérique à distance, prenant en compte le public détenu, par la conception d’un support technique capable d’intégrer l’ensemble des ressources pédagogiques. Néanmoins les expériences sont limitées et ne semblent pas tirer profit de l’expérience étrangère. En Belgique par exemple, les détenus des prisons de Béveren et de Leuze-en-Hainaut ont tous un ordinateur dans leur cellule, car le but est clairement de permettre a ces derniers de régler leurs problèmes administratifs, d’étudier, mais aussi, contre paiement, d’aller sur internet, de téléphoner, de louer des films…
Ils accèdent à leur espace sur « Prison Cloud », une plate-forme proposant un ensemble de services numériques.
Le système permet de personnaliser l’accès aux services en interdisant par exemple de regarder des films violents, aux personnes souffrant de problèmes d’agressivité ou d’apporter certaines limitations à ceux qui sont en détention préventive. Aux États Unis l’American Prison Data Système a développé une bibliothèque numérique et distribue aux détenus des tablettes androïd connectées aux établissements correctionnels de façon à ce que les détenus puissent recevoir des cours en ligne, des entrainements professionnels et des aides à la réhabilitation.Aujourd’hui cependant en France, une grande partie des détenus, dispose illégalement de téléphones portables avec l’accès à l’internet et comme on l’a vu, la possibilité, via certaines applications de diffuser en direct à l’extérieur, des vidéos et autres informations sur leur vie carcérale. Une introduction légale du numérique serait donc bienvenue, car elle apporterait un plus dans la politique de réinsertion, en réduisant les risques d’isolement et permettrait en outre, une surveillance plus facile. Son coût, si l’on se réfère aux expériences étrangères serait de l’ordre de 800.000 € par prison et pourrait être partiellement amorti en quelques années par les services payants que solliciteraient les détenus, la réduction des frais de surveillance et la participation à la digitalisation en cours de la justice.

 

Jean-Marie Vicens, bénévole Auxilia depuis 2007, formateur et responsable de groupe (Droit).

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